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Le professeur Okon et le recteur de la mosquée
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 Article publié le 8 mars 2015.

oOo

Vous allez rire
mais il était une fois
un professeur qui professait
faute de savoir faire autre chose
des dix doigts que la nature
lui avait donnés à sa naissance

Car le professeur Okon était né

Tout le monde naît
Tout le monde sait ça
mais tout le monde ne naît pas
professeur

Il y en a même qui naissent nez
ce qui est un bon début

Le professeur Okon alla
à l’école toute sa vie
mais il ne mourut pas à l’école
car il prit sa retraite
pour ne pas mourir bêtement

On parle de lui
maintenant qu’il est mort
car s’il était encore vivant
c’est lui qui parlerait de lui

Le professeur Okon écrivait
Mais attention il n’écrivait pas
comme tout le monde écrit
Il écrivait de la Poésie
de la poésie avec un grand P
et un petit e à la fin

Qu’est-ce que c’est la poésie
une fois qu’on a lu la Poésie
que le professeur Okon écrivit
Pourquoi écrivit-il de la Poésie
et pas autre chose on ne sait pas
Et on ne sait pas non plus
ce que c’est la Poésie
ni la poésie d’ailleurs
une fois qu’on a lu la Poésie
qu’écrivit on ne sait pas pourquoi
celui qui se faisait appeler Okon
faute d’avoir pu naître autrement

Quand il prit sa retraite
il écrivit encore plus de Poésie
Il en écrivit tellement
que plus personne ne se demanda
ce que la Poésie pouvait bien être
si ce n’était pas seulement de la poésie

Du coup, à l’âge de plus de soixante ans
le professeur Okon s’énerva
et envoya des lettres critiques
au recteur de la mosquée
qui avait lui aussi pris sa retraite
pour écrire encore plus de poésie
ou de Poésie on ne sait pas

Ils finirent par se rencontrer
D’abord ils se regardèrent
et quand ils virent qu’ils écrivaient la même chose
mais de manière si différente
qu’ils s’y trompaient eux-mêmes
ils se saluèrent sans cesser d’échanger
les livres qu’ils avaient publiés
et les manuscrits qu’ils se promettaient
de publier sans demander à personne
si cela faisait plaisir à quelqu’un

Ils allaient à la mosquée
et aussi dans le jardin du professeur Okon
qui en avait un ce qui tombait bien
car le recteur de la mosquée
avait besoin d’un jardin

Mais le professeur Okon
n’avait pas besoin d’une mosquée
ce qui embêtait le recteur
car il n’avait pas de jardin
pour faire la même chose
mais dans un autre sens

Ils en vinrent alors aux mains
et s’entretuèrent joyeusement
avant d’avoir pleinement goûté
aux plaisirs de la retraite

On les enterra chacun de leur côté
et on oublia qu’ils avaient écrit
pour éclairer la lanterne
de ceux qui voyagent dans le noir

Il ne fut alors plus jamais question
de Poésie ni de mosquée
pas plus que de mosquée ni de poésie

Et d’autres se mirent à écrire
sans même savoir que s’ils écrivaient
c’était parce que c’est dans l’ordre des choses
et que cela n’a rien à voir
avec les professeurs ni les recteurs
mais avec quelque chose de plus profond
qui finira par se savoir
quand les poules auront des dents

 

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