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Article publié le 9 juillet 2006. oOo Je réécris les règles du jeu (elle se touche les genoux ; elle n’entend pas mes paroles à cause des robinets ouverts). Tu t’en fiches ! hurle-t-elle en se mouchant dans mon tee-shirt couleur olive. Me bouscule en relevant sa robe. T’écris ? Tu peux traficoter la vie de qui tu veux, tromper ta propre vie, mais ne dis pas que c’est de ma faute. Combien de fois je dois t’expliquer, pauvre fille que : TU ES SEULE DANS L’HISTOIRE ? T’ES MOI, JE SUIS TOI, SEULEMENT:UNE ! SEULE ! Elle essaie de se déconnecter de ma volonté. Je décris ses paroles, ses ombres, sa toux, ses larmes, la lessive de la baignoire. Tu aimes commander, c’est ça, m’appeler blanchisseuse, cuisinière, femme de ménage tant qu’on y est ! Tu aimes me traîner dans la boue, me casser sur la tête ton présent de merde, me balader dans des maisons inconnues, dans des gares, hôpitaux, universités, académies, me mêler à des histoires d’aveugles, de miséreux, d’orphelins, etc. Tu voudrais que je joue ton rôle de malheureuse et de bonne poire. Et toi, t’as un passeport, un laissez-passer, une carte d’identité, un truc comme ça ?! Fais voir, autrement : je ne marche plus. Tu t’imagines s’il y a des gens qui constatent que j’existe ? Qui suis-je, ma belle ? Allez, tes papiers, je n’ai pas de temps à perdre avec toi. J’ai un car à 5 heures. Je dois descendre. Arrête ! Je l’attrape par la tresse, j’arrête sa respiration, je lui touche, embarrassée, les épaules. Ses seins se superposent à mes seins. Il fait déjà noir. Je pleure. Tais-toi ! Avec son air militaire et qui en impose, dure, elle me pousse en arrière, me libère, regrette, m’appelle, veut que je revienne. Encore de la chance que je sache ce que j’écris, ce que je dis et ce que je dois... Autrement... Moui. J’avance un peu. Je regarde en arrière. J’ai fini ma lessive, j’ai aéré les pièces, j’ai allumé les lampes, j’ai réussi à tout faire dans les temps. Je suis exactement l’entité qui se croit n’être rien. Il fait une nuit urbaine. Il pleuviote ? Non. Ce sont des sauterelles et des chenilles volantes. Les étoiles n’ont aucune chance. Le ciel est couvert par la fumée de la fabrique de lessive. Le néon du coin de notre rue a été volé et installé au coin d’une autre rue. Ténèbres : partout. Seule la télé éclaire ma pièce : dring ! dring ! ///////////////////////////////////////////////////////// ////////////////////////////////////////////////////////////////////// ----------------------- J’ai eu aujourd’hui 35 ans:dring ! dring ! L’apogée de la solitude c’est d’écrire sur l’amour. Bienveillante, à moitié flattée, j’ouvre.
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