Cet
ensemble à la fois romanesque et poétique propose une dizaine de compositions.
Tant en poésie qu’en matière de romans, même si l’unité de base
demeure reconnaissable, qu’on n’y cherche pas du romanesque ni du chant,
pas même de l’engagement démonstratif. La modernité littéraire française
est née dans les os d’Edgar Poe et non seulement elle y demeurera
encore longtemps, mais rien de moderne ne sortira d’une autre source.
J’ai rencontré l’écriture chez Ernest Hemingway et chez André Breton
et tiens Finnegans Wake et les Cantos d’Ezra Pound pour
les deux grands textes du XXe siècle à mon avis toujours vivant et pas
prêt de s’achever.
Loin de toute rhétorique et de toute
leçon de morale, le texte de la Rivière Noire est un ouvrage
d’esthétique. Après avoir tenté d’aller le plus loin possible sur le
chemin tracé d’avance par le langage, le narrateur, comme le poète
arabo-andalou (Wadi El Assouan), descend dans la rue pour se ressourcer.
Ainsi, le texte affecte tour à tour des allures de mauvais genre et des
aspects arrachés aux ombres, la poésie jouant le rôle d’intermédiaire
entre ces deux états de l’écriture d’ordinaire antagonistes. Le projet
littéraire est ici clair comme de l’eau de roche (pour qui sait boire)
et le monde s’y retrouve peut-être... si la part de sincérité
l’emporte vraiment sur les prétentions à la reconnaissance.