Mon cher Sidulé,
Ils sont là, ils ont failli avoir la peau du vieil Hermite du désert. L’innocent qui pensait que ses cris étaient inconséquents. Comme disait la chanson de Guy Béart, cet homme a dit la vérité, il doit etre exécuté.
Les murmures puis les voix, parfois les rires derrière la dune qui m’ensevelit peu à peu, n’étaient pas dus au seul fruit de mon imagination.
Mes cris au milieu du sable servent à quelque chose, la preuve, ils dérangent au point de m’envoyer des assassins. Un militaire déguisé en civil, un espion vêtu de soldat pour mieux dissimuler, enfin un curé transformé en moine pour mieux tromper poussaient tous trois la crête de la dune. Encouragés par le sous secrétaire d’un adjoint du concierge du bloc d’HLM où vit probablement un puissant ministre, ils allaient bientôt m’enfouir.
Quelle tristesse, moi qui croyais que ces fines particules dues à l’érosion venaient pour m’écouter, qui m’imaginais qu’elles pouvaient lire mes pensées.
Apparemment les tueurs n’ont pas encore détecté le chameau voyageur qui te fait parvenir mes missives. Chaque fois qu’il s’envole, il ne faut plus craindre une collision avec la péniche de ravitaillement. Son couloir a du être modifié, elle doit avoir mon espace aérien interdit.
S’il m’arrivait quelque chose, mon ami Sidulé, que toi et les fous qui t’entourent, ces poètes, chanteurs, musiciens, peintres, sculpteurs et autres artistes reprenez tous en cœur la chanson de Guy Béart, cela ne me ressuscitera pas mais distraira au moins les pôôvres bougres.
Bien à vous tous.
HENRI LANE
P.S. Il me parait décent de changer d’Hermitage, à moins que les méchants démasqués ne se retirent.