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Article publié le 14 novembre 2007. oOo
Lettre à Guy Môquet
Andy VÉROL Salut à toi Guy, si je t’écris aujourd’hui, c’est un peu pour profiter de ta notoriété fraîchement réactualisée par mon cher Président de la République de France... Enfin, tu dois être au courant mon garçon, si quelque chose existe, si la vie après la mort est possible... Ou bien, bon, cette lettre, elle fait un peu mal au cœur, un peu comme les complaintes de ces enfants enfermés dans des placards, qui "chuintent" fort, mais que personne ne libérera. Je t’écris aussi pour te transmettre mon désarroi. Tu ne connaissais pas ça, à ton époque, mais nous vivons aujourd’hui, pour une bonne partie de la population, dans la télévision. C’est un peu là, au fond, que l’on est censé comprendre le monde, qu’on s’abreuve aussi de tout un tas de cochonneries humaines parfois pas désagréables (Hier j’ai regardé Spiderman 2. C’est vrai, c’est doux, et les femmes n’arrêtent pas de hurler dès qu’il y a un danger, je pense que tu aurais apprécié du haut de tes 17 ans). Dans cette télévision, on a beaucoup parlé de toi. Vraiment beaucoup. Mais finalement, je n’ai pas tellement compris pourquoi les jeunes de maintenant se doivent d’entendre cette lettre que tu avais écrite à ta maman... Bon, je t’explique. Aujourd’hui, très franchement, je n’ai pas saisi la raison de la lecture de ta lettre dans nos écoles... Il est vrai que c’est très beau, ce que tu as écrit. C’est très fort. C’est plein de la fougue d’un p’tit gars qui va passer l’arme à gauche. Mais, très honnêtement, je ne crois pas que les jeunes, les lycéens d’aujourd’hui, ont besoin de tes mots pour saisir le monde. Si tu avais vécu aujourd’hui, tu aurais sans doute un look pourri, à base de gel fixant tes cheveux en crête, des pantalons stretchs, des tee-shirts criards et tu danserais quelque chose du genre la "Techtonik" avec la zic hurlante de ton MP3. Tu irais dans des festivals de rock, tu gueulerais que la "jeunesse emmerde le Front National", tu dirais à tes cons de grands-parents, que le communisme c’est de la merde... Bref. Tu végéterais sur un canapé, à bouffer des chips, à regarder des films américains pour ados... Tu trainerais dans les centres commerciaux, tu te branlerais en permanence sur des sites pornos sur Internet (Je t’en parlerai plus tard de tout ça. J’ai peur que cette fois, tu sois totalement dépassé par ce que je dis). Bref, tu serais un petit con de maintenant, un incapable, un merdeux, un bourrin qui fouette la chaussette et le stupre. Ma vision, mon regard, et mon intuition, c’est que tu devais te pisser dessus, que tu devais avoir une peur bleue de mourir... Je pense que quelques adolescents des années 2000, seraient comme toi, alors qu’une immense majorité, comme à ton époque, fermerait sa gueule et se ferait toute petite. Inversement, je pense que tu aurais aimé être un jeune merdeux d’aujourd’hui, tu aurais trouvé ça émouvant d’entendre un jeune homme écrivant à sa maman juste avant de mourir... Je pense pourtant que ce n’est pas ça qui t’aurait permis de prendre conscience des souffrances du monde... Je pense simplement que ta lettre a servi un message contraire au combat que tu menas à ton époque... Alors, je te le dis tout net gamin : la lutte continue camarade ! Andy Vérol |
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