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Choix de poèmes (Patrick Cintas)
Patrick Cintas s’autocritique genre chinois (à l’ami Robert Vitton)
[E-mail] Article publié le 27 février 2022. oOo
La métaphore, c’est bien beau,
mais ça ne vaut pas le tricot, d’autant que le lecteur s’habille, même si dedans ça frétille, et ne s’apprête nullement à tirer de ce bon roman des conclusions qui ne le vêtent depuis les pieds à la casquette. On est peut-être entré tout nu en se disant que l’inconnu ne déçoit jamais ses adeptes, mais à la fin, le seul précepte est d’en sortir sans attirer les foudres d’une société toujours encline à la critique de la nudité priapique, au mâle comme au féminin. Alors trêve de baratin et passons aux choses sérieuses, qui sont aussi avantageuses, car on y gagne en netteté ce qu’on perd peut-être en clarté. Le comment des choses renseigne, comme sur le nez la châtaigne, ou le vin né pour adoucir tant mœurs que douleur de martyr, alors que le pourquoi complique, à tel point qu’en fin de chronique, au tribunal comme au travail, on ne sait plus si le détail qui fit pencher de la balance le fléau du côté qu’on pense n’eût point plutôt à l’opposé été d’un bien meilleur effet. A force de vouloir comprendre on ne sait plus qui on doit pendre et de qui on peut ou jamais à la folie se faire aimer. Les livres sont pleins de ces drames dont on connaît les amalgames. Préférons Huck à Lancelot et avec lui foutons à l’eau le faux cadavre avec nos nippes. S’il faut aller au casse-pipes, autant fumer du bon tabac. Il n’y a jamais de pourquoi qui ne finisse en pirouette, ce qui met souvent le poète dans un état tel qu’il ne sait plus comment avant lui c’était. Depuis la guerre les écoles où on s’adonne à la bricole du pourquoi-pas-que-moi-aussi, la lorgnette sur les mercis et le cul dans les bonnes planques, ont oublié que saltimbanque rime avec comment-que-je-fais. Et qu’il faut le faire en effet avant de se mettre au théâtre et même parfois plus qu’en quatre. Aussi tenons-nous en à l’art qui exige de son taulard qu’il s’en tienne à dire les choses sans en baragouiner les causes. On n’est pas ici au palais. Vous saurez tout, je le promets, foi d’animal qu’on met en cage pour que jamais il ne partage ce qu’il sait faire et ne fait pas et ce qu’il fait comme papa. Des décennies que je mijote sans que Poésie me dorlote dans le verbiage du prolo devenu par suite intello, sans compter que les fils de putes qui de la chaise en parachute font des sauts dignes de Jésus avec des clous plantés dessus comme porche et tapisserie, proposent leurs finasseries, avec relations et consorts, et pas capables d’un effort pour ressembler à quelque chose, au comptoir de ma porte close. Je ne l’ouvre jamais pour chier, vu que c’est dedans que je fais, là où je dors, les mains ouvertes parce que la place est offerte en échange de l’interdit que par essai ou par ennui il arrive qu’on s’autorise. Il faut dire que l’entreprise a un charme fou à lier et je ne m’en suis pas privé. Au trou pour toute l’existence ! C’est ainsi que la connaissance subit la froide résection des membres conçus pour l’action. Tu parles d’azur et de cygne ! A la fenêtre on fait des signes pour avoir sa part de gaîté et de la vie peu profiter. Mais avec des riens on allège le poids sans autres privilèges que la rareté des objets que sur les doigts on peut compter. Ce n’est certes pas dans ma tête qu’il faut chercher ce qui m’arrête devant la vitrine aux jouets sans les moyens de m’en payer au moins un sans tuer personne. Ça rend la morale grognonne et elle veut savoir pourquoi. On tourne en rond comme chez soi dans ces palais où on vous juge pour avoir causé du grabuge dans des endroits du tout prévus pour susciter les prévenus et inspirer les épigones faute de la bonne personne. Violer chez l’autre son enfant n’a pas en droit d’équivalent autre qu’enfer ou purgatoire selon qu’on veut ou non vous croire, comme on s’adresse à l’animal, quand vous prétextez que le mal était déjà là à l’ouvrage, avec même ses personnages, avant que soi-même on y soit. Au risque de dire pourquoi ! Alors qu’on n’a pas eu d’enfance et qu’on était sous surveillance avant même d’avoir tout dit ! Un bon boulot au paradis n’est pas métier qui bonifie la chair peu faite pour la vie, si la vraie vie jamais ne meurt. On peut penser que le chômeur finit par trouver ce qui manque pour arrondir son compte en banque sans crever de ne pas trouver autre chose pour en rêver. Mais le vrai poète assassine en commençant par la voisine, ou le voisin s’il a du goût ! Ça ne l’avance pas beaucoup, mais ce qui est fait l’emprisonne dans les limites de la zone qu’il trace sans savoir pourquoi. Et il s’y sent plus qu’à l’étroit, surtout si vous fermez la porte à clé pour que jamais il sorte prendre l’air et les biens fondés que la loi ne veut accorder au cynisme et à la licence. Il faut soigner les apparences sans négliger les fruits cachés. Mais je vais tout vous avouer. Je ne suis pas fait pour l’aisance que connaît l’homme que la science promet au bonheur de l’acquis. Mon ouvrage n’est pas requis en cas de question essentielle. Je ne veux plus faire la belle et risquer de recommencer. Vous faites bien de m’enfermer. Me condamner à la paresse et aux attentes de l’ivresse vaut mieux que tous les jugements ordonnant que le changement d’air porte fruits sains et matures comme il est bon que l’aventure s’achève devant les enfants. On peut tout faire comme avant à condition que ça avance dans le sens de la connaissance qui est utile même au fou, pour le prix qui vaut bien le coup. Seulement voilà le salaire n’a pas le bonheur de me plaire. Je tue, je vole et je fais tout en dépit de votre bon goût. Pas moyen que je réfléchisse comme un miroir que la Justice brandit au-dessus du malheur des hommes voués au bonheur sous peine de connaître pire. Il faut vivre dans un empire ou n’être plus considéré comme un homme en tous points formé pour être à la fois fils et père, et ce dans la paix ou la guerre, ce que Dieu ou qui on voudra ordonne à tous les bons États qui n’ont rien laissé à la terre. On soigne les propriétaires, sans quoi le monde est animal. Il faut lutter contre le Mal et non point avec la paresse qui fait du bien et bien nous laisse où le hasard fait des petits. On n’est rien sans un bon parti. On pratique l’autocensure, car le mérite est la mesure et le nez l’outil du salaud qui met à l’abri bibelots et petits riens que l’héritage veut voir fleurir dans les étages. On élève des monuments pour mettre à l’œuvre le manant dont la chair est très appréciée, après l’avoir bien dépecée, car l’os n’est bon que pour meubler en attendant de repeupler. Achetez sinon on vous vire par-dessus les bords du navire, à droite, à gauche et au milieu. Et bien mesdames et messieurs, cette existence de primate, pédant, salaud ou diplomate, je n’en veux point pour mes enfants ! Et c’est en vous assassinant que je retrouve mon office, ma dignité agitatrice et la saveur de mes chansons. Excusez-moi, si la leçon vous a paru longue et diserte, mais chaque fois que je disserte avec le juge ou le bourreau, j’y mets ce que j’ai sous la peau à défaut d’y rendre les tripes comme un qui se plaint et qui flippe parce qu’il a perdu le Nord. Ça ne me coûte aucun effort et j’ai même envie qu’on m’empêche d’utiliser mes antisèches. Ah ! Faites de moi un muet même sans couper mon caquet. Ma langue lèche les fenêtres. Pas de télé, d’applaudimètre. Ma rue donne sur le soleil s’il est levé dans mon sommeil, peinture sur un paysage de vitrines et de voyages, et s’il dort je rêve de nuit. Je passe ma vie dans mon lit, léchant les mouches de la vitre qui ont des ailes sans élytres comme mes rêves de taulard. Mais je ne suis pas très bavard. J’écris des draps et des salopes, de près parce que je suis myope. Dans la rue passent des oiseaux, des nuages, des hélicos. Rien ne s’arrête en transparence. Je rêve, il faudra que je pense. Je pense, il faut recommencer. Que ton œil soit aussi rincé, mouche sans langue dans la bouche. Entre deux nuits, je me recouche. Mon angoisse cherche un emploi. Ma langue est au bout de mes doigts, comme la mouche sur la vitre, pattes de sang, fin de chapitre. Demain il faut recommencer, tout récrire sans se presser. Je donnerai de mes nouvelles aux morceaux de votre cervelle, éparpillée sur le carreau dont ma langue lèche la peau sous le regard des drosophiles qui passent dans ma rue tranquille. Voilà ce que je sais de vous et je me jette à vos genoux pour mordiller vos doigts agiles et vous rendre la vie facile.
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