|
Navigation | ||
[E-mail]
Article publié le 11 juillet 2008. oOo Hommage aux silencieux
Œil en Souffrance En cette nuit Du Vendredi Pour écrire ton nom Toi Ma mère Entendre encore Encore une autre fois Juste une seule Le chant de ta voix Courbée par les ans
Tes aphorismes apeurés Tes rires innocents Tes proverbes Tout cela Qui t’a bâti Un Refuge Dans mon corps Qui est le tien
Ma mère Ta literie de notre mémoire Commune L’as-tu donc désertée ? Ta chambre a-t-elle aussi vieilli ?
Naguère je te racontai mon Exil Que ne m’as-tu dit le tien ? Juste une fois Pour faire taire ma vanité Pour me rappeler que tu es Ma mère
Apprends-moi À te connaître Maintenant Que tu n’es plus Juste une fois
Ta voix née de la Pudeur De trop dire De ne pas assez faire Tu m’as appris l’émotion À ta rencontre, le ruisseau bruissait La terre enfantait d’un Sourire Les sentiers villageois couraient Vers la fête des pauvres Sans argent
Avec des figues Des olives, des pêches Et des melons jaunes Dans tes yeux brillaient Cette douce générosité De ceux qui ont la Nature À célébrer, au son pur De leurs rocailleuses Voix
Tu m’as appris le soleil Puis à respecter les astres À me coucher au creux des buissons À écouter nos Ancêtres Au frémissement campagnard. Tu m’as appris le doute Ma mère
Mon ventre est plein de toi J’entends ton histoire Au fonds de mes entrailles Je t’enfanterai demain Comme tu me mis au monde Hier seulement Que le temps passe vite Ma mère
Que n’avons-nous oublié de nous-mêmes ? Recommençons à jouer Juste une fois ; Je me cacherai Pour que tu me trouves ; Je me blesserai Pour que tu me soignes C’est un jeu Tu feras la morte Pour que je te secoue Aspergée de l’oued en contrebas
Réveille-toi Et… Traversons ce fleuve Ensemble
Mère des rivages marins Que n’as-tu risqué pour moi ! Du large, tu m’as apporté Tant de trésors ensevelis Au fond de notre Histoire ! Mes pieds nus Et gercés tels Juillet Attendaient ta fontaine Pour qu’elle irriguât leurs folies
Toi mère qui comptas tes sous Pour que je n’eusse plus de trous À mes vieilles frusques À jamais démodées
Je revivrais bien Juste une fois Tes colères feintes À mon vol d’un sucre D’une orange, d’un bout de pain– Nous autres pauvres On ne volait qu’à l’échelle Des pauvres Pauvres de nous !
Toi ma mère qui m’as appris La patience du supplicié Ont passé les Puissants Les colons et les drôles Toi éternelle En ton humanité Toujours Debout.
En comptant sur la lune Et mêlée aux augustes étoiles ; En scrutant l’horizon Tu passas ce siècle De ton pas résolu Toi fourmi analphabète Tu m’as appris l’unique Langue Celle-là seule qui nous unit À jamais Ta langue muette des mères
Alors que ne cesserais-je de radoter Doctement Moi ton enfant que l’École a happé Loin de ton école De vertu. Je crus te devoir Tous les diplômes Tous les errements Toutes les aventures Quand tu n’eus pour moi Qu’Amour et patience
Je reviendrai De mon pas mal assuré Me pencher pour te voir Œil en Souffrance De toi Je fermerai tous les yeux de mon corps Pour entrer en toi En ta nuit de ce jour Vendredi Jour de ton Seigneur
Je te chercherai à tâtons Mais te voir de toutes mes fibres Mon cœur en place de l’œil Et puis j’aurai mon Oreille Collée à ta couverture Faite de cette terre Si tendrement remuée Et alors je me tairai Et alors tu me parleras Entre nous.
Puis mère je reviendrai Une autre fois Puis d’autres Et d’autres
Il te faut te reposer Maintenant Ta journée fut longue Ma mère.
16 novembre 2007/ Une semaine déjà |
Revue d'Art et de Littérature, Musique - Espaces d'auteurs | [Contact e-mail] |