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"Magnus, tome II", de Stéphane Pucheu - par Jean-Michel Guyot
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 Article publié le 21 mai 2023.

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Le sommeil est plein de miracles !

Par un caprice singulier

J’avais banni de ces spectacles

Le végétal irrégulier.

 

Et, peintre fier de mon génie,

Je savourais dans mon tableau

L’enivrante monotonie

Du métal, du marbre et de l’eau.

 

Charles Baudelaire, Rêve parisien

*

Magnus rêve beaucoup mais ne dort jamais.

Il donne à rêver en plein éveil, ce qui en fait une figure poétique.

Les sens n’y sont pas réfrénés mais comme rafraîchis et canalisés par le biais-bief d’une prose obsédante qui change constamment la perspective de ses eaux vives, comme si ce moulin à paroles qu’est le Narrateur créait instantanément le devenir propre à ce qui obsède son être de fortune. Cet Empire sans emprise définit ainsi un espace de liberté tout à fait singulier.

L’espace y est sévèrement géomaîtrisé. Le soleil, par exemple, n’est qu’une sphère, pas même une boule de feu incandescent. L’espace urbain se répète à l’infini, tandis que des figures féminines apportent sensualité et frivolité à un monde qui semble déserté par la gent masculine.

La narration insomniaque de Magnus nous emmène dans des lieux métamorphiques que son regard aiguisé recompose sans cesse, sans relâche, sans lassitude.

Etant un et multiple, il va et vient dans un espace qui s’ouvre à lui à mesure qu’il le dessine.

Il part à l’aventure - la littérature est une spéculation permanente qui proscrit toute forme de repos -, il s’aventure ainsi dans des découvertes qui n’occultent rien, tout l’édifice de sa narration émanant de sa chair vive. L’auteur plonge dans Magnus à corps perdu, et ce corps éperdu de science narrative se perd dans des métamorphoses incessantes dont il ne perd jamais le fil d’Ariane en la personne de la Littérature omniprésente, seul antidote au néant.

Ici, pas de jolies fleurs ni d’espace verdoyant, encore moins de bosquets ou de forêts, mais du bitume, des édifices et des places vides que son imagination remplit de souvenirs recomposés, de fantasmes et de fleurs de rhétorique.

Stéphane Pucheu s’en défendrait peut-être, mais il faut le dire : il n’est pas poète à ses heures, mais constamment ; il invente une machine narrative froide et implacable qui, étrangement, se peuple de figures familières comme peut l’être un jeune lierre qui enserre une antique statue romaine dans un Empire narratif qui n’appartient pas qu’à lui car il pressent à chaque ligne qu’il trace que notre regard complice s’attache instantanément à ses figures de style. Ici ni pompe ni grandiloquence mais une certaine emphase rare de nos jours.

« Ici » n’est pas un vain mot mais le sésame de sa prose incisive : Magnus se pose là, dressé sur sa monture, sorte de Centaure des temps modernes. Il ne possède ni carquois ni flèche ni arc mais est possédé par l’impérieuse nécessité de narrer, comme si les mots projetés sur l’écran blanc de sa psyché faisaient instantanément apparaître ce qu’il dit.

Cette prose hallucinatoire est sa folie douce au sein de laquelle il croise de belles créatures, comme Baudelaire ses « gigantesques Naïades », à ceci près que les femmes rencontrées par lui sont prêtes à s’offrir aux caresses pénétrantes de sa prose, comme si, au sein de la narration même, la copule qu’est le verbe être établissait sans cesse une équivalence érotique entre les mots qu’il assène et les corps qu’il touche des yeux : D’oculaire, le désir devient organique. 

A n’en pas douter, les femmes ressentiront un délectable frisson à le lire, si j’en crois Magnus qui n’hésite pas à affirmer : Conjointement, des lectrices se glissent un doigt - le médium - au fond de la toison afin de frotter leur bouton, stimulées par les saillies narratives contenues dans l’ouvrage qu’elles tiennent entre les mains.

Avec ce deuxième opus printanier, Stéphane Pucheu n’effectue pas sa rentrée littéraire au beau milieu d’une cohorte de livres concurrents tous plus vains les uns que les autres ni son entrée en Littérature, mais compose sous nos yeux un ouvrage vif, vigoureux, rigoureux et cinglant : c’est que l’impression puissante demeure tout au long des pages d’une présence narrative unique en son genre qui nous le rend présent à chaque ligne.

 

Jean-Michel Guyot

11 mai 2023

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Commentaires :

  Magnus II - Dédicaces 3, 6 avril et plus

Stéphane Pucheu sera à la bibliothèque d’Estillac (près d’Agen) le 3 avril 2024 ; il y dédicacera son livre "Magnus II" (paru chez non-31 éditions).

Le 6 avril, il sera à la bibliothèque d’Agen.

Et très prochainement à l’Université d’Agen.

Affiche :


 

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