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Le grand frêne
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 Article publié le 9 mars 2025.

oOo

Et furtives d’abord tes mains

Sur les mamelons de tes seins

 

Palpitantes palpations

Orages spumeux

Se préparent

Dans les franges

De ta conque mouillée

Un élan de mer s’impose doucement

A ta poitrine

Soulève d’abord quelques gémissements

Mouettes s’égaillent dans tes yeux

Bleu profond, turquin vraiment

Taquine tes pupilles dilatées

Champs de pavots à perte de vue

Dans les volutes de ton souffle invisible

Impriment ta rétine

 

N’y tenant plus

Mains fines plongent à cœur perdu

Dans la fente fangeuse

La grotte merveilleuse

L’avers du néant

Mais son revers aussi

Monnaie de singe de l’être

Pile fait face

Et face tombe pile sur toi

Que tu ne veux pas voir en peinture

Trop d’instants se pressent en foule

Dans les pores de ta peau brune

Dans le vif il faut trancher

 

Tactile dressée

Pourtant

A fouiller-remuer

Tu es

 

Prisons de frissons

Aux barreaux sciés

Délivrent un remugle d’aise

 

Un instant matrice du monde

Nec plus ultra utérin

 

A sexe déployé tu en ris

Rendue à toi-même que tu es enfin

Divine présence de devineresse

Picotis, chatouillis, gazouillis,

Ravages !

 

Tu as le divin dans la peau

 

Ivre d’ailes, de sel et d’œufs

Cassées en deux au creux de ton nombril

Comme dans ce vieux film que tu te rejoues

A la force de tes reins

 

Jaune intense dégringouline

Le long de tes cuisses

Inonde ton sexe évasé

Avide de foutre et de miel

Ah mais quelle cuisine que voilà,

Divine coquine !

 

Dos de biche et griffes panthérines !

Doigts démultipliés tricotent dans tes chairs

De cette laine laiteuse si douce au toucher

Forces tonitruantes fouaillent tes parois rocheuses

Oh âpre envol, nuée d’envols aussitôt

Falaises vont et viennent dans ton souffle

Mais spasmes délivrent

Chassent les doigts de tes mains

Flux, flux monstrueux

Dévale le long de tes cuisses

Oh fraîcheur des rives !

 

Arbre de vie exulte

Tout entière sylve se rue dans la mer

Sourire d’ambre posé sur l’horizon

Au soleil couchant approuve gaiement

 

Jean-Michel Guyot

5 mars 2025

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Commentaires :

  Le grand frêne par Catherine Andrieu

Ce poème est un déferlement organique, une convulsion tellurique où le corps et la nature ne font plus qu’un, dans une pulsation qui dépasse l’humain pour toucher l’universel. Il y a ici un souffle presque chamanique, une transe qui emporte le lecteur dans une vague d’éléments en fusion : la mer, la chair, la terre et le vent s’y mêlent, en une même extase.

Tout est sensation, texture, friction, liquide et tension. Le lexique oscille entre la douceur du velours et la rudesse des falaises, entre le murmure et le cri, entre l’intime et le cosmos. L’écriture épouse ce mouvement : elle tangue, elle fouille, elle brasse et s’abandonne. Il y a un geste archaïque, primal, une danse où le désir s’épanouit en forces telluriques, en fulgurances liquides.

L’image du grand frêne – même si absente du texte lui-même – imprègne le poème d’une verticalité vivante, d’un élan vers la lumière, d’un enracinement aussi. L’arbre devient ce corps qui jouit, ce corps qui exulte, qui se fond dans l’immensité. Il est à la fois sexe, esprit, matrice, embrasement. Le poème bascule alors dans une alchimie charnelle où l’on sent une quête de transmutation, où l’extase semble chercher à toucher l’absolu.

L’humour se glisse, fugace, presque grimaçant, dans ce jeu sur le renversement – « monnaie de singe de l’être », « divine coquine », cette sensualité rieuse qui empêche la solennité de figer l’instant. Ce qui aurait pu être mystique reste vivant, vibrant, pleinement charnel.

Le texte oscille ainsi entre le sacré et le trivial, le viscéral et le céleste, creusant dans la matière jusqu’à en extraire une lumière insaisissable, cette fusion ultime où l’être s’éprouve enfin, « rendue à toi-même que tu es enfin ».


 

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