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Journées (Patrick Cintas) - 1ère partie
Il n’y a plus de saison

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 Article publié le 13 septembre 2012.

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Un jour que je pissais dans une encoignure moussue, une fissure dans le mur m’aspira. J’eus la sensation d’être attiré par la bouche d’un mollusque. De l’autre côté, on me sermonna. J’appris que j’étais incivique. À cet âge, les mots sont comme les gouttes de pluie. Ils tombent d’un ciel à ne pas mettre le nez dehors. Seul l’été a du charme, avec sa profusion de lumière et les réchauffements de l’ombre où se tiennent les conciles féériques. Le printemps est réduit à l’annonce, ainsi que l’automne aux antipodes de la joie, et l’hiver est taillé dans la pierre de leur visage. Ils savent tout. Je savais bien moi aussi que pisser dans l’angle crasseux de deux murs en démolition ne constitue en rien une preuve d’intelligence ni de savoir-faire ! Cette leçon ne m’inspirait pas. Je poussai un cri d’horreur qui me libéra et profitai de cet instant d’étonnement et de question pour revenir dans un endroit mieux construit pour mes rêves. On me poursuivit. Je rentrai chez moi. Je m’en souviens comme si c’était hier. Et pourtant, il ne s’était rien passé. Mais j’en retrouve tous les mots. Je me garde bien de les écrire, car ils n’appartiennent qu’à moi. Ai-je recommencé ? Ils me haïssaient si je recommençais. Ils installaient les bornes de leur guet. Quel silence ! Je redoutais un enterrement. Sur les toits, je me prenais pour un marvel. Descendant le long d’un tuyau qui noircissait mes ongles, je m’introduisais par effraction dans leur monde au lieu d’y être brutalement contraint. L’urine prenait un autre sens. Elle indiquait clairement mon passage clandestin, signait mon insolence et augmentait leur colère. Ils auraient pu installer des pièges. L’un d’eux pensa à deux fils de fer produisant une différence de potentiel. J’étais là quand ils le traitèrent de fou. Il s’était levé lentement, comme si une grande fatigue venait de le réduire à mon désir, et il était rentré chez lui. Je l’ai suivi. Il habitait lui aussi dans un angle et l’ombre était son royaume. Je le vis se coucher tout habillé dans un lit défait et jaune comme son regard. Il se mit à fixer le plafond. Cela dura des heures. Je ne le vis pas mourir, car je m’étais endormi. Ils firent irruption au matin. Le soleil n’était pas encore levé. Ils se figèrent, ne s’approchèrent pas du cadavre, se turent ensemble, voyant que la table portaient mes traces. Mais ils ne parlèrent pas de moi en sortant. Ils n’évoquèrent que de vieux souvenirs où les chats n’ont pas droit à la parole.

 

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