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Revue en ligne

vendredi 29 mars 2024

Revue d'art et de littérature, musique
Directeur: Patrick CINTAS
Sommaire

1. Tractatus ologicus
de Patrick CINTAS

édition de la première trilogie

2. Deux nouveaux recueils
de Marie SAGAIE-DOUVE

traces de trame
les silences font des trous

3. L'étranger
nouvelles contributions de Pascal Leray et de Ignacio M. Sanchez-Prado

4. Espaces d'auteurs
Avec l'arc noir - L'illisible signifiant - Línea de sombra - Le zinc - Les jours


1

TRACTATUS OLOGICUS
roman

Patrick CINTAS

Première trilogie

"ANAÏS K."



  Préface: Cosmogonies
  Tome I: Emori nolo
  Tome II: Memento mori

En ligne
Nouveau
Tome III





2

Marie SAGAIE-DOUVE



deux nouveaux recueils
Collection HORS SÉRIE


  traces de trame
sourire à travers les larmes/un être libre//la douleur/contient la beauté//autrui commence/l'intelligible//où naît le langage/témoigne l'en deçà
  les silences font des trous
monde sous ta main/ces alluvions ces vestiges//scrute ce que dérobe le jour/lignes de fracture/forêts d'algues/roses coquillages sur mousses d'émeraude

*

  Déjà en ligne:


éphémérides

illustré par Valérie CONSTANTIN
traducido al castellano efémerides
por Patrick CINTAS.

monde sous les os//la cendre des jours/dans la chair//miroir en éclats/remue l'autre figure//l'éclair strie l'obscur/une absence évide l'angle/ouvre la couture/


3

L'ÉTRANGER


Nouveautés
Qu'est-ce que L'étranger?
Ouvrir la fenêtre

Pascal LERAY
Fragments d'un carnet barré
Je me suis précipité sur un carnet pour retrouver tes mots, tes absences de mots. Des nuits, des jours, quand tu ne parlais pas.
L'araignée - Chanson
Aglaé/si tu sors/reprends tes heures avec toi/tisse au sol ton jeu étroit/siffle encore comme on te parle

Ignacio M. SANCHEZ-PRADO
Poesía para nada
Poésie pour rien

J'ai appris à écrire Une poésie qui ne sert à rien Et j'ai laissé la nostalgie Transformer mes cris et mes palais En ruines fantasmatiques D'une théorie quelconque De la révolution sociale.

4

ESPACES
D'AUTEURS


Nouveautés
Que sont les espaces d'auteurs?
Ouvrir la fenêtre

Avec l'arc noir Nouveau
Pascal LERAY
Une épopée psychique
Le commentaire d'une oeuvre est un miroir d'Alice. Mais le poème Avec l'arc noir est-il un commentaire du tableau de Kandinsky. Le titre désigne un point d'impact, assurément.

Línea de sombra
Oscar PORTELA
Argentina, algo menos que un sueño
Los Fundadores dirían que fue solo un sueño. García Márquez afirma en las páginas finales de "El General En Su Laberinto" que mientras se empeñaba en liberar un Estado, el anterior estaba viviendo ya los retablillos de una guerra civil y así fue.
Meditaciones sobre ética en tiempos de penuria
Los medios trastornados por el rating y las ansias de poder dejan sus esenciales tareas de información para transformarse en salvajes jueces utópicos de situaciones en las que sólo debe intervenir la Justicia. Motivado por ello, el poeta y pensador argentino Oscar Portela habló fundamentadamente sobre este tema, cuyo disparador fue un reciente y sonado caso (Alberto Peyrano).

Le zinc
Robert VITTON
Le zinc est le parlement du peuple:

Le zinc du forge-mètre - Analectes
Après le rideau d'une galerie de portraits parlant, comme le cinéma, Robert VITTON ne quitte pas le Zinc. Voici ce qu'ont encore foulé ses coudes.
Numéro spécial
Ce numéro VITTON est évolutif (work-in-progress). On pourra le consulter pour lire les nouveautés dont Robert VITTON l'enrichira avec le temps. On peut dès lors en mesurer l'ampleur.

Les jours
Patrick CINTAS
En ligne
L'espace de Patrick CINTAS, qui propose déjà le téléchargement gratuit des textes intégraux de la cinquième édition des Jours au format PDF, en propose maintenant la lecture en ligne.

ÉDITO

COMBAT CONTRE LE PÈRE
TRACTATUS OLOGICUS III

Honni soit le père qui mal y pense

Image de Patrick CINTAS
Connexions

Au lecteur que l’attente désespère, je conseillerai de commencer la lecture du Tractatus ologicus au Livre deuxième du troisième tome intitulé "Combat contre le père". Il pourra ensuite se plonger dans les tomes précédents, à savoir "Emori nolo" et "Memento mori", puis dans le premier livre dudit combat. Je reconnais d’ailleurs que tout ce qui précède ce chapitre XXII relève d’une profondeur dont le roman lui-même peut se passer, si ce n’est qu’un roman.

Avec ce "Combat contre le père" s’achève la première trilogie du Tractatus ologicus. Il y en a d’autres sur le chantier. Ce lecteur, non pas impatient, mais désespéré, y trouvera peut-être des raisons de considérer que je sais ce que je fais quand je construis un texte aussi étendu et complexe que ce Tractatus. Je le souhaite en tout cas. Car si j’ai résolument opté pour une narration facile dans les faits, la lecture est par contre un peu difficultueuse. C’est que l’écriture, surtout quand elle est facilement narrative, est un partage de terrain connu, tandis que le texte, imaginaire et forcement à soi, ne communique pas aussi commodément ses théories. Si nous devons nous rejoindre quelque part, ce sera toujours dans nos ressemblances qui sont quelquefois ce que nous connaissons le mieux de nos apparences.

L’idéal serait que le lecteur puisse renvoyer le texte avec l’usage qu’il en fait, mais c’est trop demander à ce monde qui ne croit pas à l’art et qui se fourvoie encore dans la superstition et l’autorité inattaquable des charlatans qui mettent de l’argumentaire à la place de la foi, comme de vulgaires marchands, ce qu’ils sont d’ailleurs souvent. Pourvu que la lecture de cette modeste contribution au roman ne subisse pas ces mécréances croyantes qui offensent la dignité humaine et qu’au contraire elle ne croie plus qu’à l’inconcevable et à l’imaginaire qui s’ensuit. Qu’elle croie que nous existons pour autre chose que les révélations et les combines rituelles. Et que ce père dont je parle si longuement pour raconter le monde tel que je le vois de ma fenêtre, que ce père soit plus que tué, qu’il soit exclu de la communauté des hommes et que de sa poussière naisse une ontologie des particularités. Voici un paradoxe sans cesse exploré dans ces anecdotes constituées en roman, un divertissement sans fin qui se propose de tourner en rond pour ne pas dépasser la limite imposée par la dignité, un pléonasme inachevé qui se nourrit des contradictions et des anachronismes sur lesquels on bâtit encore des seigneuries, etc.

Le spectacle constant mis en œuvre par les moyens d’information ne propose que les tableaux de sa tragédie et non les actes de notre comédie. Il s’ensuit qu’il n’est plus possible, avec ces moyens, de voir "entre les actes", de s’impressionner au contact de ce qui bouge encore quand la parole s’est tue au profit de l’attente. Et entre les tableaux (Iran, Irak, poulets, tribuns, moustiques, marchés, etc.), l’interstice est tel qu’un doigt n’y fourrage rien à sucer. Cette tragédie veut se "constituer" en seul spectacle du monde, avec des variantes singulièrement manichéennes, et la vie quotidienne, qu’on trouve quelquefois ordinaire sinon ennuyeuse, ne nous offre guère de possibilités d’échapper à ce vote forcé. La comédie littéraire, réduite à l’appréciation des vues et des projets immédiats, ne va jamais plus loin que les feux de la rampe qui l’éclairent. Ainsi, et nous ne nous en rendons pas vraiment compte, nous ne posons jamais la première question, mais bien celle qui vient "après", après quoi ? c’est encore une question. Les raisonnements consistent plutôt à opérer par récurrence, partant d’un résultat taillé à la mesure de l’attente (ou de l’espoir) et aboutissant à des conclusions qui en sont en fait l’hypothèse doctrinale et non hasardeuse (à l’opposé du suicide, en somme). Le cas de Dieu, à la mode en ce moment, est exemplaire ; il est l’hypothèse déduite d’une loi conçue pour servir les uns et asservir les autres ; et jamais il n’est la réponse à la question de l’incréé. Sans doute s’agit-il d’un faux problème, d’une question de personnage imaginaire mis à la place du vide, une manière d’habiter ce vide, ailleurs différemment apprécié, en bonne compagnie. L’idée même de Dieu se fonde sur la terreur qu’il inspire. Il n’y a de vraie soumission que dans la contagion du syndrome de Stockholm. Et si l’on y est arrivé par le bas, comme c’est plus souvent le cas pour les infortunés que nous sommes en regard de ceux qui naissent tout habillés, il y a toutes les chances pour que cette convivialité impose des contraintes parfaitement étrangères à la question divine, comme tout ce qui est attributs, droits, traditions et autres forceps du bonheur.

C’est ici que la figure du père inflige ses sacralisations à la tentation de penser librement, qui ne se conçoit pas en religion, créant la loi tutélaire et séraphique de la crédulité passablement mâtinée d’opportunisme et d’activisme. Il est déjà bien ignominieux de tenir pour sacrés les contes, les objets et les rites qui triomphent des comportements. Y a-t-il une différence entre croire au Loupapa ou à la vérité de tel ou tel principe communautaire (jolie façon de parler des sectes). Aucune. Croire est la pire des impostures adressées à sa propre descendance. C’est pourtant ce qu’exige le père, qu’il soit enturbanné de noir ou de blanc, surmonté de la cerise d’une calotte ou même investi du pouvoir de juger, de voter des lois ou d’administrer les corrections et les enseignements. Mais s’il est sain de ne plus croire, à partir d’un certain âge qui ne se calcule d’ailleurs pas, aux fées et aux petits lutins, il est moins facile d’adresser à cette maturité légale les reproches qu’elle mérite chaque fois qu’elle dépasse les bornes de la tolérance. Mettre le pouvoir entre les mains d’un croyant est, après la croyance même, l’imposture majeure. Elle nous inflige des renoncements à la place de l’aventure, des humiliations au lieu des péripéties favorables au voyage et à sa promesse de narration. Et d’imposture en mystification, l’esprit n’agit plus entre les actes, il s’active plutôt à les anéantir, quand il s’active, sinon il perpétue et rend grâce.

Le combat contre le père est une description de cette lente liquéfaction des actes au profit d’une connaissance qui prend la parole au lieu de la donner. Agir sur cette eau est un plaisir, notamment celui de conter qui prend le pas sur l’art de faire des romans. La voix s’éclaire de sa diction. Le corps engage le combat. Les mains triturent le père devenu l’argile de la langue et non pas son verbe. Ce retour à la matière est aussi un acte de foi, mais d’une foi sans prosélytisme, sans rituel, sans jugement imprécatoire. Croire qu’il est possible encore d’inventer la parole au lieu de spéculer sur les circonstances de son verbe est une croyance singulièrement détachée de la foi qui la promeut. C’est croire surtout qu’un roman peut se former à la surface des récits, qu’ils peuvent échapper aux expérimentations et aux mythifications, croire que cette unité peut légitimement se comparer à ce qu’on est quand on n’est plus l’officiant ni le fidèle. C’est croire qu’il est possible de s’interposer, par l’entremise de la narration poussée dans les cordes du roman, entre l’idée de l’incréé, qui n’est pas bête, et celle du créateur qui naît de sa propre circonstance. Voici ce qui a été tissé dans l’imposture et dans l’habileté par le père peut-être réduit à ce fil d’une histoire que rien, pas même sa cohérence, ne parviendra à reconstruire comme c’était, et c’est déjà une victoire, si ce mot, climax des plaisirs, doit nécessairement s’aboucher avec le combat. Le père doit, à bout de force, demeurer sans descendance. D’où la sensation d’incréé, de possible incréation, de chuchotement sans voix, de caresse éventuelle.

Mais rien ne serait possible (ou facile, j’hésite) sans la leçon des conteurs. Au diable les écrivains ! À la baille ceux qui reviennent sur l’ouvrage pour en faire un métier ou une profession de foi ! La leçon de Maupassant ou de Caldwell, entre autres innombrables marginaux de l’écriture, passe par le jet qui décrit la page sans l’éclabousser. À la longue, la "critique" s’y retrouve et s’en flatte. Méfions-nous alors de ces tentatives de reconnaissance en paternité. Ce sont de toutes petites religions, des sectes minuscules qui n’atteignent pas l’ignominie[1] des grandes, mais elles sont légion comme les poux, vivaces comme le lierre et prolixes comme le vin. Elles servent à parachever l’oeuvre de contention, elles soudent les grandes pièces, mobilisent des factions d’immobilités. Le combat consiste alors à briser le laitier pour faire apparaître cette œuvre d’arc électrique dans le métal rejoint de nos errances. Cela se dit, cela se raconte et le fil est un jet en réponse à l’électrode paternelle, en démocratie comme ailleurs.

"Un organe de plus ou de moins dans notre machine nous aurait fait une autre intelligence," écrit Montesquieu[2]. Ce qui nous pousse heureusement à reconsidérer, d’un côté comme de l’autre, tout ce qui ajoute sa foi[3], ou plus prosaïquement son fonctionnement, à un organisme voué à la destruction privée. Car ce qui peut mettre fin à la vie, quand l’existence n’est qu’une passade personnelle, ce n’est pas la mort, mais son utilisation massive ou sa fatalité catastrophique. En ce sens, la mort est d’essence divine et la destruction une énigme de la banalité du suicide et de la fragilité des conceptions cosmologiques. Ces moments physiques sont suffisamment éprouvants pour qu’on accepte sans broncher la prescription d’un père qui s’érige au lieu de bander bonnement.

Patrick CINTAS

Lectures :

La trilogie divine de Philip K. Dick.
Schopenhauer.
Camille Flammarion.
Charles Darwin.
Guy de Maupassant.
Erskine Caldwell.

Sites :

themodernword.com/scriptorium/dick.html - The modern world - Scriptorium.
atheisme.free.fr/ - Athéisme - L’homme majuscule.
spinozaetnous.org/ - Spinoza et nous.


[1] Ignominie : je dois ce terme à Blaise Cendrars (La main coupée).
[2] Mal cité par Maupassant dans sa Lettre d’un fou, mais l’idée est écrite au sujet du "goût" et pour l’Encyclopédie.
[3] Traditionnellement : en Orient, le temps, et en Occident, l’espace. Et plus près de nous : la soumission, avec son cortège de cris nationalistes, et le cyberespace, pur métal aux propriétés organiques. Etc.

 
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