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Tostes - avec Frédéric Bobin (musique) & Rémo Gary (chant)
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 Article publié le 20 décembre 2020.

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Robert Vitton - Tostes - avec Frédéric Bobin (musique) & Rémo Gary (chant)

Je bois aux as aux astrologues

Aux escobars aux avortons

Aux époux du grand catalogue

Aux galifards aux marmitons

 

Je bois aux fils de l’Harmonie

Aux fieux aux féaux d’Apollon

Aux vieux ressorts de l’ironie

A l’âme de bois des violons

 

Je bois la caravane passe

Je m’évade de mes prisons

Et je me perds dans les espaces

Jusqu’aux barreaux de l’horizon

 

Je bois comme un trou un trouvère

Comme quatre affreux frelampiers

A tous les brocs les quarts les verres

Et je danse sur mes deux pieds

 

Je bois dans les mains de Lalique

Et dans les vases de Gallé

Les murs me donnent la réplique

Je n’ai pépie ni bec salé

 

Je bois aux amours de naguère

Je bois aux amours de tantôt

A la paix des entre-deux-guerres

A l’âne du roi d’Yvetot

 

Je bois aux jacques et aux gilles

Aux flambeaux de saint Mathurin

Aux naufragés de l’Evangile

Aux anges légers de deux grains

 

Je bois aux valets aux meschines

A la trame des traminots

Aux damnés de l’orde machine

Aux pas de deux des dominos

 

Je bois à la Mort qui savoure

Outre mesure mes bons mots

Les beaux récits de mes bravoures

De grime aigri de gris grimaud

 

Je bois en hâte à mes prochaines

Escapades hors de ce temps

Où les dieux bénissent les chaînes

Et bottent les culs pénitents

 

Je bois aux onze mille vierges

Je bois au retour des soldats

Je bois à la clarté des cierges

A la Rose et au Réséda

 

Gueux de la foire Saint-Ovide

Mille sabots mille sabords

Nos six aunes de boyaux vides

Emplissons-les de piot ras bords

 

Je bois à la mienne à la vôtre

Je bois à la tienne à la leur

Je lève des pots aux apôtres

Le coude avec des querelleurs

 

Je bois aux bijoux aux fanfioles

Des filles folles de l’été

Aux fées noyées au fond des fioles

Aux mendiantes en gaieté

 

Je bois à même la bonbonne

Le baril et le tonnelet

Je bois à même mon trombone

J’ai mis au clou mon gobelet

 

Je bois aux oiseaux de passage

Aux miséreux de Richepin

Je bois aux fous je bois aux sages

Aux poudres de perlimpinpin

 

Je bois comme un trou un troubade

Et je fume comme un sapeur

Je bois aux troublantes tribades

Je bois aux trois-quarts de mes peurs

 

Je bois du doux et du sévère

Une eau-de-vie bien de chez nous

Je suis fidèle à mon calvaire

La mer murmure à mes genoux

 

Je bois cul sec mes héritages

Sur les zincs mats dans les bordels

Dans les bouibouis de bas étage

Où je sirote des rondels

 

Je bois dans tous les bars au barde

A l’aède au trousseur de vers

Et je fais rimer hallebarde

Avec eustache et revolver

 

Je bois je bois gars aux gavaches

Je bois garçonnes aux gaveaux

A tous ceux qui crient Mort aux vaches

Ceux qui tiennent le caniveau

 

Je bois aux abbés aux bécasses

Je marchande mes abatis

J’imbibe ma frêle carcasse

De Bandol et de Frascati

 

A la fontaine d’Hippocrène

J’y bois j’y boirais tout mon soûl

Avant que la soif me reprenne

Muse ouvre-moi tes noirs dessous

 

Que n’ai-je un estomac d’autruche

Une éponge dans le gosier

J’avalerais charrettes cruches

Tonnes tonneaux foudres casiers

 

Je bois je boite comme un chantre

Entre Montparnasse et Bercy

En cherche de la plus proche antre

C’est le plus grand de mes soucis

 

Je bois pour les yeux d’Aphrodite

De Saint-Eustache à Saint-Merry

Le vin est bu la messe est dite

Pascal a perdu son pari

 

Je bois sous les bois de justice

Sous le hachoir d’un des Deibler

Pour les mauvais les bons pâtissent

Je rime sur le Pré aux Clercs

 

Je bois je bois toutes mes rentes

Dans le Paris des années vingt

Dans le Paris des années trente

Dans le Paris des écrivains

 

Sans boussole sans astrolabe

Je traîne au large un pied marin

Je cloche comme un trissyllabe

Dans un moule d’alexandrin

 

Je bois pour oublier mes tares

Je bois pour m’en ressouvenir

Je bois au bois de ma guitare

Qui ne cesse de s’abonnir

 

 

Robert Vitton

 

Notes

Toste : coup bu à la santé ; en ancien français, le « toste » désignait une tranche de pain grillé (du latin « tostus ») que l’on trempait dans du vin.

Antre : a été employé au féminin par le poète Vauquelin de la Fresnay (16e siècle).

 

 

Paroles : Robert VITTON

Poème extrait des « Nuits Rouges », Le Chasseur abstrait éditeur.

Musique et arrangement : Frédéric Bobin

Interprétation : Rémo Gary – album Idées reçues -

http://www.remogary.com/

 

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