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Seriatim 2 - [in "Seriatim"]
Seriatim 2 - C’est un de ces matins qui chasse les noirs poteaux de l’angoisse (Patrick Cintas)
![]() oOo C’est un de ces matins qui chasse les noirs Poteaux de l’angoisse. Derrière le mur est nu Comme une statue. On entend, si on veut Écouter, les ruissellements des sous-sols. Je m’absente. Oh, dit-il, ça ne durera pas. Je me connais. J’en ai vite fini avec la vie Comme avec les heures. La nuit tombe encore En fines gouttes. J’en ai le crâne comme La vitre de mes regards. Derrière le mur Connaît des mouvements d’une lenteur Exaspérante. On se demande ce qui va Arriver et si c’est déjà arrivé. Si c’est Le cas : léchez le timbre de vos e-mails. Laissez la trace de votre passage de la vie À la mort. Consultez les entrées et noyez Les sorties. Personne ne sort sinon. Voici La première eau stagnante et le vent sans Les voiles. Des lamparos forcent la transparence. L’eau parle, ensable, érode le cordage vieux. Le matin l’angoisse est un personnage aussi Ancien que le travail. Quel bouquin accompagne Cette errance qui propose ses ballades ? Ou complaintes si on y cherche des poux. Encore fait-il avoir rencontré quelqu’un. Mais le vide est le principe régalien des matins. L’aurore prend son temps. La Lune hésite. Personne pour saluer. Mais des ombres Habitent l’ombre. Chocs des bouées contre Les parapets. Levons la patte par-dessus L’amas des chaînes. La rouille teint la pierre. Figures d’une éternité en attendant le déluge. Rien n’a changé que la langue. Refrains reviennent Entre les lignes de fuite. Qui construit dans l’abstrait ? Ces façades à la tyrolienne. Figées dans la lumière Des trottoirs. Rien ni personne. Comme si j’étais Mort et que je me croyais vivant. Qui cherche Le ou la coupable ? Des affiches changent le sens. Est-ce bien le vent ? Détruis la ponctuation avant Qu’elle ne te redonne du pep. Glisse au lieu De marcher. L’hiver ne promet plus la neige Ni ses sommets. La route serpente et traverse. La main au taquet il se hisse. Dissolution. Les Choses perdent leurs liens. Comme l’écume Après la vague. La question est de savoir Qu’est-ce que je veux posséder. Autrement Dit : qu’est-ce que je veux laisser ? La valse Des ricochets prend fin avant l’autre rive. Le compte est exact. On ne se trompe jamais. Un galet de moins sur la plage, pense-t-il, Pensant mais pas un galet de moins dans l’absolu qui me hante Des traces mènent quelque part. Qui n’a pas mesuré la solitude au fil de l’eau Ou au ressac ? On aime les variations du mythe Plus que le nom qu’on lui donne. Pourtant le nom C’est le mien. Personne sans théâtre où se jouer Du hasard. Traces d’un éphémère figé par Cristallisation de leur ténacité. Qui n’en soupçonne pas Les possibilités dramatiques ? Les amas de filets En vrac et ceux qui attendent le ravaudage. Passe Son chemin le long de ces gisants. Voit peut-être Plus loin que la surface bleuie. Soie des rouges Et des jaunes. Voici un matin qui ne s’achèvera pas Par volonté nocturne. Et ne me parlez pas De l’influence du rêve : je n’ai pas rêvé quand j’ai vu. Quel silence le sommeil qui attend son heure ! Heureusement le soleil n’a pas perdu la trace. Lotus et silènes comme métaphores et du sable Dans les oreilles. Quelle dune ne participe pas À l’horizon ? Sur son âne agite un bâton. Prononce Un seul nom. Et recommence jusqu’à aujourd’hui. De message en message. Colporteur des levains. Ce sont donc ses traces pense-t-il. Qui démentira ? Le corps étanche sa soif à d’autres sources désormais. Beaux poèmes des marches. Entre l’orée et les champs. Imaginant la personæ. Intuitu. Bas-reliefs des cloisons Et des couloirs. Portes et fenêtres des perpendicularités. Quel infini à franchir entre le mythe et la métaphore ! La terrasse n’a pas retrouvé ses chaises. Aucune trace De lutte à la surface mouillée des tables. Pas d’insectes Dans l’air. Des agitations de lumière tout au plus. L’ombre semble leur tourner le dos. Mais il suffit D’une porte ouverte pour l’éclairer. Matin des portes Qui attendent le moment. Le premier moteur, pétard Sans feu d’artifice, coq des grillages d’eau et d’écume. Faut bien se trouver quelque part pensant alors ici Ou ailleurs Mais rien ne t’appartient à part tes fringues Et ton argent de poche. Qui ai-je pu oublier si vite ? De qui me suis-je éloigné ? Je n’ai pas la sensation D’avoir fui. Je suis allé d’un point à un autre, en rond. J’ai aimé la connaissance des lieux et le temps qu’il faut Pour les haïr. Petite toupie dans le creux d’une main. Miroitante comme des élytres. Le mot me trouve Où je suis. Mais il ne m’appartient pas. Je fais avec. Est-ce que faiseur convient à votre dignité d’être Ce que vous êtes ? M’as-tu-vu et bluffeurs à la pelle. Croissance narcissique et déclin mémoriel. D’un trait
Voici ce qui nous appartient Et voici ce qui se vend / prend Ma main et laisse-toi aller / Passons devant les mêmes Vitrines / saluons les mêmes Personnages sans les nommer / seul le fils a un nom : le père Est mort / et d’un geste connu De tous il invite la foule à sa table Sous le parasol éreinté de soleil / voici ce qu’il chante ou dit (selon les uns et surtout les autres)
Alors… ? Poète ou homme d’esprit… Le passant des interstices qui n’ont Pas plus de réalité que la ligne ni Le point ?
Organise le concile au bar / Le comptoir est dehors l’été Et l’hiver il faut entrer pour Trouver quelqu’un à qui parler / « si je dois exister » mais laisse Sa parole trouver la suite sans lui.
Ne cherchez pas la nuit après le jour / elle vous fera courir sans trouver Le sommeil / « mais de quel sommeil Parlez-vous, monsieur ? » / je parle Pour ne rien dire d’autre, c’est connu / je parle parce qu’il faut meubler La chambre où le sommeil attend Son heure / sinon je ne parlerais Pas / je ne serais même pas là À vous parler de ce que je crois Savoir / de ce qui me pousse à agir Comme vous me voyez ne rien faire / c’est beau, l’absence / surtout si Personne ne s’est absenté / la place Est chaude pourtant / qui ? mais qui ?
« ce n’est pas que je m’ennuie… » Exégèse interrompue par la nécessité De gagner sa croûte et celle de ceux Qu’on aime / dommage que je n’ai pas Pensé à te donner des ailes ou la technologie Palliative du moment / un seul vol Au-dessus de tout / « c’est demander Beaucoup au Pouvoir, monsieur ! » Mais je connais l’Ordre aussi bien que vous !
Pourquoi se mentir alors qu’il est si facile de se taire ? Mais comment couper dans la langue sans exaspérer L’attente ? / De Vigny à Pessoa le vin de la physique La plus probable : et des érections de midi en plein Soleil agité de vents contraires et d’autres semences Moins improbables / fleurs renflées qui pètent avec L’enfant que ça amuse / pas loin d’ici le premier enfant Donné comme tel / sans indice pour le reconnaître / Ment aux silènes et aux lotus / ment au chat et aux Poissons déjà morts / ne connaît pas le sens mais joue Avec / vibrations des persiennes dans la voix, étale Son savoir avec le sable et cueille ce qui se laisse Emporter / comme s’il était déjà au marché, fignolant Ses questions sur le cuir des vieux / « si tu avais des ailes, Tu en ferais quoi ? » / imite aussitôt le F-18 des Arabies Et saute par-dessus le parapet pour courir vers la mer Qui (je le sais) l’attend / « vous ne voyez pas qu’il vous ment ? — Je ne suis pas aveugle, mais je sais regarder ailleurs ! »
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